Fox-Boy - Angle Mort – © Éditions Delcourt, 2016 – © Laurent Lefeuvre, 2016
Jérôme Noirez
Angle Mort, le second tome tant attendu du comics Fox-Boy vient de sortir aux éditions Delcourt dans la collection Contrebande. Avec aux manettes, cumulant scénario, dessin et couleurs, Laurent Lefeuvre. Ce nouvel épisode entraine notre super-héros breton d’abord en Auvergne, puis en Centre-Bretagne où ce dernier devra affronter mille dangers. Mais surtout, il découvrira ses origines grâce à sa rencontre avec un collectionneur et expert en comics.

Infos pratiques

Fox-Boy – Angle Mort

Laurent Lefeuvre

Laurent Lefeuvre

Laurent Lefeuvre

France

Delcourt

Contrebande

Inédit

Avril 2016

Tome 2

112 pages

Moyen

978-2-7560-6989-0

15,95 euros

©Éditions Delcourt, 2016 –© Laurent Lefeuvre, 2016

Retrouvez
la chronique

Rencontre avec Laurent Lefeuvre et Thierry Mornet

Fox-Boy 2 – Angle Mort

Laurent Lefeuvre

Éditions Delcourt

Chronique réalisée par Lionel Gibert et Jean-Marc Saliou
Fox-Boy - Angle Mort – © Éditions Delcourt, 2016 – © Laurent Lefeuvre, 2016

Monstres & compagnie

Auvergne et Bretagne / De nos jours

Super-Héros

NOTRE ÉVALUATION

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HISTOIRE

Voici notre super-héros breton de retour pour de nouvelles aventures… Rappelons que la particularité de ce super-héros est qu’il est un Breton attaché à ses racines celtes et en phase avec son époque… Déjà, dans le premier épisode, Lefeuvre nous faisait découvrir les rues sympathiques de Rennes, sa ville natale, sous un angle original, en lui insufflant une dimension fantastique. Pol Salsedo, lycéen et futur bachelier poursuivi par une bande de son lycée se réfugie par hasard, lors d’une fête foraine, dans l’antre d’un mage : le fakir Dotki. Envouté, il devient Fox-Boy, Renard-Garou aux multiples pouvoirs. Tout d’abord enchanté, il découvrira que la réalité est toute autre. Dans cette histoire, Lefeuvre s’attache surtout à définir les différents caractères de son personnage. Certes, il n’affronte pas le Joker ou Catwoman, mais se voit confronté à la réalité quotidienne et à ses drames : et plus particulièrement à la mort brutale et tragique de son ami Nizar.

Au moment où commence cette nouvelle histoire, Pol Salsedo est parti se ressourcer en plein hiver en Auvergne, pour y prendre du recul après la mort de son ami Nizar. Le voici donc en terre arverne. Comme en Bretagne, chaque région a ses légendes fantastiques et celle-ci ne saurait échapper à la règle… Dans des conditions climatiques extrêmes, notre jeune héros se voit devoir affronter un loup-garou auvergnat. Mais ce n’est rien à côté de ce qui l’attend lors d’un périple à Guerlédan. Lors de cette escapade, il est invité chez un expert et collectionneur en comics, Alain Chevrel. Grâce à lui, Fox-Boy va en savoir plus sur ses origines. Au-delà de ses révélations, il va devoir affronter des créatures maléfiques issues d’un monde parallèle… Pol Salsedo arrivera-t-il tout seul à faire face à cette nouvelle menace ?

Fox-Boy – Angle Mort– © Éditions Delcourt, 2016 – © Laurent Lefeuvre, 2016

Lecture

Après un premier opus prometteur, Laurent Lefeuvre confirme les espoirs qu’il avait fait naitre dans ce second épisode. Une histoire plus sombre et dramatique que la précédente, mais qui développe un imaginaire riche et captivant. C’est en tout cas ce que Lefeuvre nous avait montré dans le premier épisode, La Nuit du Renard, lequel se déroule à Rennes, sa ville natale. Comme nous l’avons évoqué, ce super-héros breton est donc attaché à ses racines.Les racines justement, lesquelles constituent l’une des principales thématiques de cet ouvrage. L’auteur nous le rappelle dès le début grâce à une séquence d’ouverture particulièrement réussie où le rêve se confond avec la réalité. Le découpage dynamique et à la fois saccadé de cette scène en renforce toute l’intensité.

Pour autant, ce deuxième tome nous entraine tout d’abord en Auvergne. Et Lefeuvre, en régionaliste convaincu, nous montre que chaque région a ses mythes. Cette première partie s’avère particulièrement captivante. Tentant d’oublier le drame que constitue le décès brutal de son ami Nizar, Pol cherche à se ressourcer. Mais très vite, des événements vont l’amener à affronter de nouveaux dangers. Cet épisode remarquable par son intensité dramatique n’est pas sans rappeler le mythe de la bête du Gévaudan. Rappelons que le Gévaudan est une ancienne région historique située en Lozère (Languedoc-Roussillon) non loin du sud de l’Auvergne. Et la nature, accompagnée de ses conditions climatiques désastreuses – tempêtes de neige, bourrasques –s’invite dans cette péripétie, constituant un ennemi redoutable et imprévisible. L’évocation du passé (la Seconde Guerre mondiale) nous rappelle également que dans toutes les régions françaises, le souvenir de l’occupation est toujours douloureusement ancré dans les mémoires. Dans cette première partie, Lefeuvre nous montre son aisance pour entretenir le suspense grâce à un sens du cadrage et de la mise en scène qui rappelle bien évidemment ses influences américaines.

Par la suite, l’auteur nous en dit plus sur l’origine des super pouvoirs du Renard-Garou. De retour de ces péripéties auvergnates, Pol Salsedo est contacté par Alain Chevrel, expert en comics et collectionneur averti. Direction le lac de Guerlédan (Centre-Bretagne) où réside Chevrel. Cette seconde partie tout aussi captivante malgré un scénario un peu alambiqué, se montre riche en rebondissements. On peut reprocher à cette partie beaucoup de dialogues et une intrigue un peu confuse. Mais encore une fois, celle-ci nous éclaire sur les origines de notre héros. De plus, Lefeuvre invite une cohorte de super-héros qui affrontera des créatures diaboliques. Ces super-héros sont d’ailleurs issus de l’univers des Éditions Roa que Laurent Lefeuvre évoque dans deux ouvrages précédents (Tom et William et La Fabuleuse Histoire des Éditions ROA). Cet univers proche des comics et des fumetti nous invite à la nostalgie pour ces illustrés bon marché (Akim, Zembla, Battler Britton) regorgeant de trouvailles graphiques et scénaristiques. Ces ouvrages étaient dessinés parfois par d’illustres inconnus, mais pas toujours : c’est ainsi que Jordi Bernet (Tex, Torpedo) ou De la Fuente ont pu faire leurs armes dans ces éditions. Ces trouvailles sont sans aucun doute un clin d’œil aux fameuses éditions LUG qui ont bercé la jeunesse de nombreux lecteurs de comics. Pour finir, restituer le décor du lac vidé ne fut pas chose aisée et LeFeuvre s’en sort fort bien. En effet, le dessin du panoramique du lac Guerlédan en accentue la profondeur abyssale.

Angle Mort test donc un tome beaucoup plus sombre que le précédent. Lefeuvre s’avère un excellent narrateur comme le prouve le traitement graphique. Ainsi, l’utilisation remarquable de fonds noir intense, alliée à des couleurs sombres, appuyées et denses renforce l’aspect dramatique de certaines situations. On pense plus particulièrement au face-à-face avec le loup-garou, mais aussi quand Fox-Boy, certes épaulé par ses alliés super-héros, doit lutter contre les créatures maléfiques réveillées par le fakir Dotki. Lefeuvre nous tient donc en haleine jusqu’au bout. On signalera également des couleurs remarquables et un dessin très enlevé, dynamique, bien que perfectible pour certaines scènes. Ce dessin nous rappelle celui des comics américains, mais pas seulement. Insistons cependant sur l’influence de ces derniers, notamment Eisner pour certaines mises en page comme le panoramique du lac de Guerlédan, ou la page-titre du « Mal Loup ». Ces fameuses pages-titres où Eisner excellait notamment lors des épisodes de son mythique Spirit. Dans cet exercice de style, Lefeuvre s’avère être à la hauteur, rendant ainsi hommage à son mentor américain. N’oublions pas non plus comme auteurs américains Steve Ditko ou John Romita Jr dans certaines scènes d’action. Pour autant, l’auteur ne renie nullement l’école franco-belge. On pense notamment à Hermann. En tout cas, ce second épisode de Fox-Boy semble synthétiser différents super-héros comme Batman, Spiderman ou Daredevil, sans pour autant les plagier. Son mérite et son originalité sont de faire de Fox-Boy un super-héros « à la française ». L’action y est en outre plus présente que dans le premier tome. Par ailleurs, le personnage de Pol Salsedo, alias Fox-Boy, a manifestement gagné en épaisseur, en maturité, marqué au plus profond de lui par la mort de Nizar et par son impuissance à pouvoir le sauver.

La mise en scène pointue, offrant des cadrages bien maitrisés, fait de cet épisode une vraie réussite. Notamment dans la représentation des rêves (voir scène d’ouverture) ou dans l’épisode du « Mal Loup ». En tout cas, ce super-héros breton nous séduit bien volontiers, renouvelant le genre et perpétuant ainsi la tradition des comics US. On attend impatiemment la suite !

Vidéos

Bande-Annonce de Fox-Boy, tome 2, Laurent Lefebvre, Éditions Delcourt.

Fox-Boy interviewé par son auteur. Laurent Lefeuvre.

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